mardi 27 septembre 2011

Ce non-article ne parle ni de voyage, ni du Cambodge, ni des Philippines

Je n'avais pas d'appareil photo lors de mon voyage au Cambodge. Ça tombe bien, je ne compte pas faire d'article type carnet de voyage.
« Je me rends donc au bureau de change à la sortie du hall de l'aéroport. Je croise un chien énorme, vraiment très gros. Et là paf ! je change mon fric et il s'avère qu'un seul dollar équivaut à 4000 balles locales. Ahurissant non ? »
Et un séjour si court ne m'a pas non plus donné la prétention d'avoir saisi la vraie nature des choses que j'ai rencontrées.
« Il y avait des temples partout, c'était à vomir. Camoufler le culte de la personnalité derrière la religion… Un dictateur sacrément rusé ce Bouddha ».
Mes observations m'ont toutefois permis de réfléchir un peu sur les Philippines. Mais ce ne sera pas non plus une creuse comparaison par négatif.
« Et là, j'étais dans un autre putain d'univers. Vu la rudesse du ton du vendeur de la boutique de souvenirs de l'aéroport, j'étais carrément loin de l'omniprésent sourire Pinoy ».
Hypocrite et rusé, je vais simplement faire semblant de ne pas raconter mon voyage.

Contraste Manilliste

Sunrise Street, ma rue à Manille, est à l'image des Philippines : les bidons villes jouxtent des villas atrocement luxueuses. De ma fenêtre, on peut difficilement ignorer les cubes de tôle trouée adossés au mur surprotégé du palace voisin. Les écarts de richesse apparaissent de façon moins obscène au Cambodge. Et bien qu'ayant eu la croissance la plus forte en Asie du Sud-Est dans les années 2000 (comme si la croissance devait signifier quelque chose), il ne se gène pas pour transpirer la pauvreté. Les prix ont l'air plus bas, donc les revenus aussi. C'est un exemple qui n'exprime pas grand chose, mais les 3 euros variables quotidiens de Marlon, conducteur de tricycle de 6 à 18h dans ma rue et alcoolique à temps plein, restent loin devant les tristes 40 euros mensuels mais stables du bavard conducteur de touk-touk m'ayant tenu compagnie en attendant le bus à Phnom Penh. Il m'a d'ailleurs donné l'occasion d'apprendre les détails de l'institutionnalisation de la tarification dermato-catégorisée. Ça va loin puisque la différence entre les clients Khmers et les étrangers est même à la source de l'organisation des conducteurs de touk-touks, de leur affectation, leur nombre et leurs horaires.



On retrouve le grand classique du « Filipino Time » (NDLR : le « Filipino Time » est une imposture visant à faire passer le retard horaire pour un trésor culturel). Et la familiarité que l'on retrouve dans les transports en commun se voit même transcendée une fois monté dans le bus. Les karaokés s’enchaînent en formant des comédies-musicales interminables. Et les légendaires films de baston niakwés se retrouvent magiquement agrémentés d'un doublage cambodgien monotone enregistré sur une bande son quasi-vierge. On passe alors du statut de victime d'humus cinématographique à celui d'anthropo-spectateur euphorique des téléspectateurs hilares.


Sur la route, on s'étonne d'une pub pour des capotes puisque l'on est en provenance d'un pays sur-reproductif interdisant l'avortement, le divorce et s'opposant massivement à la démocratisation contraceptive. Mais la densité qui saute alors aux yeux dans la campagne marécageuse cambodgienne, elle est culturelle. Les temples ne se comptent plus et leur beauté devient habituelle. Et finir par visiter Angkor rassasie cette soif d'identité propre et dépaysante qui constitue la quête de tout bon faux-vagabond. (Cette quête, on lui urine à moitié dessus un peu plus bas). C'est là que les Philippines ont l'air toutes nues. Leur histoire est extrêmement riche, mais leur identité est complexe. Originellement non-unifiée culturellement, la nation de l'archipel s'est construite sous 3 siècles de colonisation castratro-espagnole, puis 40 ans de colonisation développo-américaine. Et à Manille, ancienne « Perle de l'Orient » et carrefour économique du Royaume d'Espagne, les vestiges historiques pour en témoigner s'en sont pris plein la gueule : les niakwés sont passés par là, en faisant la ville la plus ravagée de la seconde guerre mondiale après Varsovie.

Moi à Angkor 

Et après tout, pourquoi s'obséder à l'exotisme passé ? C'est un facteur d'explication mais la recherche d'authenticité exotique biaise les observations et la compréhension actuelles. Ce qu'il faut saisir, c'est l'Ainsité, la vraie nature des choses. Les Philippins, c'est pas des types qui portent des slips en peau de buffle pour pêcher à mains nues. Les références et modèles culturels se sont dés-exotisés, ce qui frustre le faux-vagabond. Car comprendre les Philippines, c'est aussi observer l'adoration des malls, de la consommation, des vies et loisirs occidentaux apportés officiellement par les USA avant la WWII, et officieusement après. Des vestiges traditionnels, trous d'oxygène identito-culturels subsistent parfois. Géographiquement, les zones reculées donnent cette impression. Mais même au fond du plus perdu village flottant traversé en barque dans la mangrove cambodgienne, les antennes télés prolongaient les pilotis. Et qualitativement, certaines valeurs ne s'altèrent pas. Chez les Philippins, les superstitions persistent, les amenant à croire en Dieu autant qu'en Casper. Et on retrouve aussi par exemple le foyer pluri-générationnel qui échappe encore à notre modèle de famille nucléaire.

Moi dans un village flottant

La saison des pluie, elle, reste sacrément visible. Et le Déluge qui s'est abattu sur le Cambodge a fait passer les terribles inondations de Manille pour de la pleuviote de gonzesse. (NDLR : après l'angoissant typhon d'hier, je retire un peu ce que je viens de dire). On le comprend assez vite lorsque l'on abandonne le touk-touk en panne dans une rue-torrent et que l'on se presse vers l’hôtel dans une eau couleur brique qui avale suspicieusement nos jambes. Le résultat est le même, l'eau fait craquer des maisons mais marrer les enfants. Elle angoisse par contre le faux-vagabond qui ne veut pas rater son avion et qui se retrouve à traverser à l'aube la ville fantômatico-engloutie sur une motocross dont la selle peinait à sortir de l'eau.

Moi  à moto

En ce qui concerne le légendaire sourire philippin (qui peut toutefois exprimer la bienveillance et la gratitude tout comme la gêne et l'incompréhension), j'ai facilement trouvé ses homologues cambodgien et malaisien. Devant l'omniprésence de ce caractère chaleureux, je me suis remis en question : et si finalement, j'avais pas, moi-même, une part de responsabilité ? J'en arrive donc à cette conclusion : chaque pays me confirme que je suis un type sacrément chouette. Tout le monde m'appelle « my friend » et me propose des « special discounts just for you ». Oui, parce que les négociations gardent leur caractère permanent, et s'y habituer les rend sympatochement endiablées. J'ai donc entamé mon budget cadeaux dans les infinis marchés de Kuala Lumpur. Et les perles s’enchaînaient dans ces ersatz de Divisoria jetés autour de Chinatown, au cœur d'une capitale bien plus homogène et bien moins crade que Manille.



Bref, camoufler des récits et observations de voyage s'est avéré plus dur que ce que je pensais et j'ai ultra la flemme de retravailler cet article. J'en referai sans doute un sur les Philippines quand je m'en irai, dans deux mois. (ouais, ça passe vite en fait) (et dans 2 semaines j'aurai déjà fini la fac) (et d'ailleurs, au second semestre je vais plus à Singapour pour étudier mais à Shanghai pour me faire exploiter, The Didiest a encore de belles heures devant lui).

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